Justice et tribunaux

La responsabilité de la personne qui porte secours à quelqu'un

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La vie en société nous impose à tous une certaine responsabilité sociale qui implique, entre autres, d’aider une personne se trouvant en difficulté. En situation d’urgence, il est possible que le sauveteur ou le «bon samaritain» pose un geste qui cause un dommage à la personne qu’il cherche à aider. Il est aussi possible que le sauveteur subisse lui-même un dommage en raison de son intervention.

Éducaloi vous explique dans cette capsule l’étendue de l’obligation d’aider une personne en difficulté et les conditions qui doivent être rencontrées pour que le «bon samaritain» soit tenu responsable des gestes qu’il a posés en situation d’urgence.

Est-ce que j’ai l’obligation de porter secours à une autre personne qui se trouve en danger de mort?

Généralement, oui. La loi demande à chaque citoyen de porter secours à une autre personne dont la vie est en péril. Cette obligation existe, par exemple, pour tout conducteur qui est impliqué dans un accident routier, mais aussi pour toute personne témoin d’une situation où une intervention urgente est nécessaire en raison des conséquences dramatiques qui peuvent en découler.

Par exemple : votre voisin s’effondre subitement sur sa pelouse, victime d’un infarctus. Vous avez l’obligation de lui porter secours en appelant les ambulanciers et en l’aidant physiquement, si vous avez les capacités et les connaissances pour le faire.

Vous accomplissez votre devoir de secours chaque fois que vous apportez personnellement l’aide physique qui est nécessaire dans l’immédiat de même que lorsque vous obtenez du secours en demandant l’aide de la police, des pompiers ou des ambulanciers.

Attention ! Vous n’avez pas l’obligation de porter secours à autrui à tout prix. En effet, vous pouvez vous abstenir de porter secours à quelqu’un lorsqu’une intervention pose un risque pour votre propre vie ou pour la vie de d’autres personnes ou pour tout autre motif raisonnable.

Exemple : vous arrivez sur les lieux d’un accident impliquant des dizaines de victimes. Après avoir communiqué avec les services d’urgence, vous aidez les victimes les plus mal en point. En théorie, les blessés que vous n’avez pas eu le temps d’aider ne pourraient vous en tenir rigueur.

Ou encore : vous êtes témoin d’un accident où une voiture plonge dans une rivière. Si vous ne savez pas nager, vous n’avez pas l’obligation d’essayer de sauver la vie du conducteur en plongeant à votre tour dans la rivière. Vous avez toutefois l’obligation d’appeler pour obtenir du secours rapidement.

Si en situation d’urgence j’aide quelqu’un mais que, par la même occasion, mon intervention cause des dommages, peut-on me tenir responsable?

La loi prévoit qu’une personne qui porte secours à autrui ne peut être tenue responsable des dommages que son intervention peut provoquer. On appelle ce moyen de défense la règle du « bon samaritain ».

Mais attention! Le secouriste ne peut pas utiliser ce moyen de défense si les dommages qu’il cause sont dus à sa faute intentionnelle ou à sa faute lourde :

  • Une personne commet une faute intentionnelle lorsqu’elle a l’intention de nuire à quelqu’un ou de lui causer un préjudice.
    Exemple : vous détestez la victime et vous retardez le moment d’appeler du secours de façon à ce que la personne souffre de son état.
  • Une personne commet une faute lourde lorsque sa conduite dénote une insouciance, une imprudence ou une négligence grossière qui ne tient pas du tout compte des intérêts d’autrui.
    Exemple : pour sauver la vie d’un ami qui se noie, vous poussez des gens hors de leur embarcation et causez leur noyade.

À quel genre de conduite est-on en droit de s’attendre d’un bon samaritain?

On s’attend d’un bon samaritain qu’il intervienne lorsque c’est nécessaire et qu’il mette en œuvre tous les moyens raisonnables qui ont une chance de succès pour remédier à la situation.

S’il n’y a aucune chance de succès, mais que le bon samaritain fait le choix d’agir quand même, il commet alors une imprudence grave. La règle est simple : le sauveteur doit être ni trop téméraire, ni trop imprudent, sinon il peut contribuer, par ses gestes, à aggraver une situation déjà difficile.

Les tribunaux excusent le geste maladroit du bon samaritain qui cause un dommage. Exemple : en pratiquant la réanimation cardiaque sur quelqu’un, vous lui brisez deux côtes. Vous ne pouvez être tenu responsable d’un tel geste malencontreux.

Les tribunaux n’ont pas la même clémence lorsque la cause du dommage résulte d’un geste téméraire de la part du bon samaritain.

En portant secours à quelqu’un, j’ai subi un dommage. Est-ce que je peux recevoir une indemnisation pour cela?

C’est possible. La Loi visant à favoriser le civisme prévoit que la personne qui porte secours à une personne en danger peut recevoir une indemnisation. En cas de décès de la personne qui a porté secours, son conjoint et ses enfants peuvent aussi, dans certains cas, recevoir une indemnisation.

La loi permet au sauveteur de recevoir une indemnisation pour l’atteinte à son intégrité.

Cependant, vous devez savoir qu’une indemnisation en vertu de la Loi visant à favoriser le civisme n’est pas automatique. Elle est possible seulement si le bon samaritain n’a pas droit à une indemnité ou une compensation prévue par une autre loi du Québec.

Malgré cela, vous avez toujours le droit de poursuivre la personne responsable de votre préjudice devant les tribunaux civils afin de recouvrer l’indemnité nécessaire pour équivaloir à la perte réelle que vous avez subie.

Est-ce que j’ai un délai à respecter pour réclamer une indemnité?

Oui. Le délai est généralement de 3 ans pour présenter sa demande. Ce délai de 3 ans commence :

  • à partir du moment où vous prenez connaissance du dommage subi, ou
  • à partir du décès du sauveteur.

Si le délai n’est pas respecté, vous perdez votre recours, sauf si vous prouvez un motif raisonnable pour expliquer votre retard.

Il n’y a aucun délai pour présenter une demande d’indemnisation si vous êtes intervenu pour prévenir ou arrêter un crime qui implique de la violence subie pendant l’enfance, de la violence sexuelle ou de la violence conjugale.